Les compositeurs ont souvent tenté de renforcer l'unité
des oeuvres longues ou en plusieurs mouvements. Un de moyens utilisés
était le rappel d'un thème ou d'un motif entendu
précédemment, soit dans le même mouvement, soit dans un autre
mouvement. Jouer un thème plusieurs fois dans un même mouvement
était chose commune, mais le rappel thématique à travers différents
mouvements d'une oeuvre, permettant de créer un lien fort entre les
différents mouvements, était peu répandu avant le XIX-ème siècle.
Une extension du rappel thématique, la transformation thématique, a
peu à peu pris place pour venir enrichir le lien pouvant exister entre
les différentes occurrences d'un même thème. L'idée de transformer un
thème, par exemple pour le développer (mouvement contraire,
rétrograde, augmentation, diminution, etc.) date de bien avant le
XIX-ème siècle. Mais il était très rare, avant et pendant la
période romantique, d'observer une oeuvre en plusieurs mouvements dans
laquelle tous les thèmes étaient reliés entre eux par des
transformations.
La sonate pour violon et piano de Franck, dite communément sonate de
Franck (1888), est d'après Vincent d'Indy "Le premier et le plus
pur modèle dans de l'emploi cyclique des thèmes dans la forme sonate"
([1]). Bien qu'il existât déjà certains oeuvres à caractères
cyclique, Franck fut le premier à aller aussi loin. Nous verrons dans
cette sonate que les liens thématiques sont très forts et qu'aucun
thème n'y apparaît sans relation avec les autres.